50 Nuances de Grey, ou la surprenante vertue de la violence conjugale

Publié le 21 Mars 2015

   Certaines personnes ont l'intuition pour trouver l'idée qui fera gagner de l'argent, indéniablement. Pensant que l'amour en soi devait sembler éculé aux milions de lecteurs de la planète, l'auteur de 50 Nuances de Grey a donc lâché toute son imagination et ses fantasmes pour rajouter du sadomasochisme. Jusque là, rien de mal, si cela sert un propos ou au moins sert une qualité et un talent particulier. Malheureusement pour le monde, ce n'est visiblement pas le cas ici et au lieu de servir une idéologie, cela sert un opportunisme flagrant et un manque d'intelligence évident. Et l'une des pires choses de l'humanité, c'est qu'un opportuniste réussit trop souvent son coup. Nous voici donc avec une adaptation "phénomène" d'un livre "phénomène" qui va surement bouleverser le monde. Oui ... enfin non, absolument pas. 

    Une fois le dur retour à la réalité après deux heures interminables, un seul constat s'impose dans la tête de quelqu'un d'un peu réfléchi. Quel était l'intérêt de ce film ? Là où l'enthousiasme autour d'un film est parfois saugrenue voir déplacé, avec celui qui nous intéresse ici, on touche le paroxysme de mon incompréhension. A quel moment les élements de cette chose ont pu prendre un sens et une telle énergie de fascination pour tant de personnes ? Non parce qu'honnetement, il n'y a quasiment rien à sauver dans ce film. Et le problème se pose déjà, là, en tant qu'objet filmique en soi, ce film est juste affligeant. Mettant de côté une photographie passable et quelques lumières pas trop ratées, tout le reste constitue une accumulation de mauvais goût et d'erreurs sans nom qui ne résultent que, à l'instar du livre, d'un pure et simple opportunisme pour amasser encore plus d'argent autour cette histoire. La réalisation est plate, et la musique nous offre un Danny Elfman en complète roue libre et des musique de licences terriblement mal exploitées. 

50 Nuances de Grey, ou la surprenante vertue de la violence conjugale

   D'un autre côté, quand les deux têtes d'affiches d'un film ont le charisme proche du zéro, on pouvait déjà suspecter quelque chose de malveillant. En outre, quand dans les faits, ils ont l'air autant impliqué dans leur jeu que s'ils allaient faire leurs courses, on peut définitivement conclure que ce film partait droit dans le mur. D'aucun diront que tout ceci est une affaire de précipitation dans la fabrication de ce film, ou bien que je suis de mauvaise foi, mais les faits sont là, et ne pas s'en rendre compte particpie juste à l'aveuglement général. Les acteurs sont mauvais et n'ont pas grand chose derrière eux, en terme scénaristique ou de mise en scène, pour venir sauver les meubles branlants qu'ils n'essayent même plus de terminer. Reste face à nous un couple sensé brûler de désir, mais dont aucune alchimie ne ressort, et ceci à aucun instant du film. On en viendrait presque à se demander les raisons qui motivent leur attirance respective tant leurs moues figées et leurs regards de bovins nous rappeleraient plus le salon de l'agriculture qu'une vraie composition d'acteurs. Si fait, le film tente donc de nous convaincre que, l'argent attire, et que se comporter comme une garce, comportement symbolisé par ... le mordillement d'un crayon (je vous jure que c'est la vérité), sont les deux rouages d'un amour profond et véritable. Merci pour cette agréable leçon. 

    Le pire dans tout cela, c'est qu'on aurait pu passer outre, eventuellement, d'un tel défaut de charisme dans le casting ou d'une telle fadeur dans l'écriture des deux personnages, s'ils vivaient une passionnate histoire. Mais non, toujours pas pour cette fois. 50 Nuances de Grey raconte globalement autant de choses que la notice d'un grille pain, et je dis ceci avec beaucoup d'affection pour les grille pain. Ce premier film n'en est pas un, il s'agit ni plus ni moins que d'une immense scène d'exposition, étirée à son paroxysme pour nous donner l'illusion d'une véritable histoire. Mais ne nous voilons pas la face, tout ce que l'on voit dans ce film ne sert qu'à lancer la suite. On a au mieux une ébauche approximative de psychologie, tout du moins ce qu'ils prennent pour de la psychologie, et l'installation d'un enjeu. Reste à prouver par la suite l'intérêt de cet enjeu qui pour l'instant, ne semble se cantonner qu'à "vais je rester avec toi ?". Du reste, il n'y a rien, ou alors si peu. Deux trois passages de personnages secondaires vaguement utile à quelque chose, quelques mentions de faits dont ils veulent garder le mystère. Pour sur, la suite s'annonce aussi palpitante que de regarder Motus, si l'histoire ne raconte rien de plus que la vacuité de cette relation profondément malsaine. 

50 Nuances de Grey, ou la surprenante vertue de la violence conjugale

       Car oui, venons en au fait, à l'élement le plus incongru et qui déchaine mon dégoût profond pour ce film et cette histoire : 50 Nuances de Grey est malsain, au mieux profondément misogyne. La femme principale de ce film perd toute sa vertue en l'espace de 30 secondes, quand trois plans plus tôt elle était encore vierge, et accepte de devenir l'objet d'un homme plus flippant que charismatique au problème relationnel assez prononcé et n'ayant apparement pas complètement résolu son Oedipe. Néanmoins, elle fait machine arrière une fois qu'elle a comprit que, le sadomasochisme, c'est douloureux. Après d'amples remerciements au Captain Obvious et à sa famille, le générque finit par arriver et nous délivrer de cette sombre torture. Et comme on l'avait tous vu venir de loin, les scènes de sexe ne sont même pas intéréssantes, en plus d'être d'une pudeur assez putassière quand on observe le propos du film. Hyporcrisie quand tu nous tiens. 

    Aimer 50 Nuances de Grey est libre de droit à quiconque, le porter au nu comme une fantastique histoire d'amour ou un film génial, c'est en revanche plonger dans les méandres de la bêtise. La seule qualité hypothétique que porte cette chose, c'est de nous démontrer qu'avec tout le talent d'un morceau de pain, on peut gagner de l'argent. Du reste, il ne demeure qu'un vide abyssale et pour couronner le tout, profondément misogyne. Amis du goût et de la qualité, passez votre chemin ! 

Rédigé par Venom Snake

Publié dans #Critiques

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